Vioxx - Lectures et articles

MSD annonce le retrait volontaire du marché de VIOXX dans le monde - 30 septembre 2004

Merck Frosst remboursera aux patients les comprimés inutilisés de VIOXX

Le Vioxx : aussi grave que l’affaire du sang contaminé ! - 6/10/2004

Le Vioxx, Retrait Mondial sur Ordonnances - vendredi 1er octobre 2004

Anti-inflammatoires (AINS) du groupe des coxibs : Attention aux risques cardiovasculaires

Médicaments : ce que les labos ne disent pas - 17 décembre 2004

Miracle : après Tchernobyl, la France épargnée par le Vioxx!

MSD annonce le retrait volontaire du marché de VIOXX dans le monde

Whitehouse station N.J. Etats-Unis, Septembre 30, 2004

MSD annonce le retrait mondial volontaire de VIOXX® (rofécoxib), médicament indiqué dans l’arthrose et la polyarthrite rhumatoïde. La décision de l’entreprise qui entre en vigueur immédiatement est fondée sur les nouvelles données à 3 ans, issues d’un essai clinique prospectif, randomisé, contrôlé versus placebo, l’essai APPROVe (Adenomatous Polyp Prevention on VIOXX).

L’essai qui a été interrompu était destiné à évaluer l’efficacité de VIOXX 25 mg dans la prévention des récidives des polypes colorectaux chez les patients avec des antécédents d’adénomes colorectaux. Dans cette étude, une augmentation du risque relatif des évènements cardiovasculaires confirmés, tels que l’infarctus du myocarde et l’accident vasculaire cérébral (AVC), a été observée au delà de 18 mois de traitement chez les patients recevant VIOXX par rapport aux patients sous placebo. Les résultats des 18 premiers mois de l’étude APPROVe n’avaient pas mis en évidence d’augmentation du risque d’évènements cardiovasculaires confirmés avec VIOXX, de même que les résultats des deux études contrôlées versus placebo décrites dans l'AMM actuelle de VIOXX aux Etats-Unis.

« Nous prenons cette mesure car nous croyons qu’elle sert au mieux l’intérêt des malades », a déclaré Raymond Gilmartin, Chairman, President et Chief Executive Officer de MSD. « Il aurait été peut-être possible, en accord avec nos autorités de santé, de poursuivre la commercialisation de VIOXX en modifiant le Résumé des Caractéristiques du Produit et en incluant ces nouvelles données. Mais compte tenu des alternatives thérapeutiques disponibles, et des questions que soulèvent ces nouvelles données, nous avons décidé qu’un retrait volontaire était l’attitude responsable à tenir ».

APPROVe était une étude multicentrique, randomisée, contrôlée versus placebo, en double aveugle, destinée à déterminer l’effet du traitement avec VIOXX sur une période de 156 semaines (trois ans) sur la récidive des polypes néoplasiques du côlon chez les patients avec des antécédents d’adénomes colorectaux. L’essai a inclus 2600 patients et comparé VIOXX 25 mg au placebo. L’inclusion dans l’essai a commencé en 2000.

VIOXX a été mis en France à disposition du corps médical en avril 2000, remboursé en juillet 2001 et mis sur le marché dans plus de 80 pays.

Les résultats de l’étude VIGOR (VIOXX Gastrointestinal Outcomes Research), publiés en mars 2000, ont montré que le risque de toxicité gastro-intestinale était moins élevé avec VIOXX qu’avec le naproxène, mais ils indiquaient également une augmentation du risque cardiovasculaire par rapport au naproxène.

Cependant, dans d’autres études, notamment nos études de phase III, qui ont été à la base de l’Autorisation de Mise sur le Marché du médicament, aucune augmentation du risque d’événements cardiovasculaires avec VIOXX comparé au placebo, ou avec VIOXX comparé à d’autres anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) autres que le naproxène, n’avait été mise en évidence. MSD a initié des essais cliniques randomisés à long terme afin de disposer d’un tableau encore plus complet du profil de sécurité cardiovasculaire de VIOXX.

« MSD a toujours été convaincu que les études cliniques prospectives, randomisées, contrôlées sont la meilleure façon d’évaluer la sécurité d’emploi des médicaments. APPROVe correspond précisément à ce type d’étude et nous a fourni de nouvelles données sur le profil cardiovasculaire de VIOXX », souligne le Docteur Peter S. Kim, President de Laboratoires de recherche MSD.

« Si la cause de ces résultats est encore incertaine aujourd’hui, ils suggèrent une augmentation du risque des évènements cardiovasculaires confirmés survenant après 18 mois de traitement continu. Bien que nous sachions que VIOXX était bénéfique à de nombreux patients, nous estimons que cette décision est appropriée ».

MSD a informé la Food and Drug Administration et les autorités réglementaires des autres pays de sa décision. L’Entreprise procède également actuellement à l'information des médecins dans les pays où VIOXX est sur le marché. Il est recommandé aux patients qui prennent actuellement VIOXX de consulter leur médecin traitant afin de discuter de l’arrêt du traitement avec VIOXX et des alternatives thérapeutiques possibles.

Les résultats des études cliniques avec un médicament dans une classe donnée ne sont pas nécessairement applicables aux autres médicaments de cette même classe. En conséquence, la signification clinique de l’essai APPROVe, s’il y en a une, concernant l’utilisation à long terme des autres médicaments dans cette classe, à savoir les inhibiteurs spécifiques de COX-2 et les AINS, est inconnue.

Concernant les prévisions financières, MSD a communiqué des prévisions de bénéfice par action pour 2004 dans une fourchette $3,11 à $3,17. L’Entreprise s’attend actuellement à un impact négatif sur ces prévisions de $0,50 à $0.60 conséquence des coûts générés par le retrait du médicament. Cette estimation inclut les ventes déjà réalisées, les retours clients du produit déjà vendu, les coûts de mise en place du retrait du médicament, les sorties de stock, le cas échéant. Sont incluses dans cette estimation les ventes non réalisées de VIOXX pour le 4ème trimestre, de l’ordre de 700 à 750 millions de dollars. De plus, nous prévoyons qu’environ un mois de stock dans le monde est déjà chez les clients et qu’il sera retourné.

A ce jour, nous ne savons pas quels sont les coûts qui seront enregistrés sur le 3ème trimestre et ceux qui seront enregistrés sur le 4ème trimestre. Par conséquent, à ce stade, MSD suspend ses prévisions pour le 3ème trimestre.

MSD publiera ses résultats pour le 3ème trimestre le 21 octobre 2004. L’Entreprise fournira des informations complémentaires concernant les coûts générés par le retrait du marché du médicament.

Merck Frosst remboursera aux patients les comprimés inutilisés de VIOXX

Le processus de remboursement se fera comme suit :

1.  Les patients peuvent retourner les comprimés inutilisés à la pharmacie où a été exécutée l'ordonnance.
2.  Le pharmacien remboursera le patient pour les comprimés inutilisés retournés à la pharmacie.
3.  Le montant remboursé sera calculé en fonction de la somme versée par le patient au moment de l'exécution de l'ordonnance.4.  Veuillez noter que la date limite pour les demandes de remboursement et les retours de produit est le 30 novembre 2004. Les patients ne doivent pas jeter les comprimés inutilisés dans les toilettes et les lavabos afin d'éviter de contaminer les eaux souterraines et le système d'aqueduc municipal. Le retour à la pharmacie des comprimés non utilisés permettra non seulement de rembourser le patient, mais aussi d'éliminer le médicament de façon sécuritaire.
De plus amples renseignements sur la politique de remboursement peuvent être obtenus au www.merckfrosst.com ou en appelant le Centre d'information à la clientèle au 1 800 567-2594.
La décision de Merck & Co., Inc. de retirer volontairement VIOXX(R) est fondée sur de nouvelles données recueillies sur une période de trois ans au cours d'une étude clinique contrôlée par placebo (l'étude APPROVe pour la prévention des polypes colorectaux). Dans cette étude, on a observé un risque accru d'événements cardiovasculaires, tel que crise cardiaque et accident
vasculaire cérébral, après 18 mois de traitement chez les patients prenant VIOXX(R) (25 mg, une fois par jour), comparativement à ceux prenant un placebo.
Les patients qui sont actuellement traités avec VIOXX(R) devraient communiquer avec leur professionnel de la santé afin de discuter de l'arrêt du traitement avec VIOXX(R) et des traitements de remplacement possibles.    Au sujet de Merck Frosst Merck Frosst est l'une des plus importantes sociétés pharmaceutiques de recherche au Canada. En 2003, la société a investi 116 millions de dollars en recherche et développement au Canada. Merck Frosst Canada & Cie et Merck Frosst Canada Ltée sont deux filiales de Merck & Co., Inc., située à Whitehouse Station, au New Jersey. Merck & Co., Inc. est une société ouverte inscrite à la bourse de New York (symbole MRK). On peut obtenir de plus amples renseignements sur Merck Frosst à l'adresse http://www.merckfrosst.com

Le Vioxx : aussi grave que l’affaire du sang contaminé ! - 6/10/2004

Le retrait du Vioxx du marché par les laboratoires Merck le 30 septembre 2004 est un événement considérable. C’est le plus gros retrait en terme de chiffre d’affaires jamais réalisé. Le laboratoire Merck était aussi une sorte de porte-drapeau de l’industrie pharmaceutique réputé pour sa recherche et son éthique.

Vioxx appartenait à une nouvelle classe de médicaments - les cox- qui était présentée comme des aspirine améliorée, c’est-à-dire sans les effets secondaires de type ulcère d’estomac. C’était même leur seul avantage. L’affaire Vioxx pourrait être un exemple de ce qui se passe aujourd’hui au niveau de toute l’industrie pharmaceutique.

En fait la mise sur le marché de cette nouvelle classe (en 1999 aux Etats-Unis et en 2000 en France), il est apparu que leur léger avantage sur l’aspirine (ou les autres anti-inflammatoires) ne duraient qu’un an et disparaissaient ensuite. Une étude de l’assurance maladie montre d’ailleurs que des antiulcéreux sont prescrits en association avec les cox aussi souvent que pour les autres anti-inflammatoires. Rien ne justifiait donc les prix exorbitants qui ont été accordés : 35 fois plus cher que le Di-Antalvic générique !

Dans la négociation avec les laboratoires au moment de la mise sur le marché, il était d’ailleurs prévu que le prix baisserait de 15 % en 2003. A cette date J.F. Mattéi a annulé par décret, de manière subreptice, cette baisse prévue. Sans explications.

En fait, on sait depuis 3 ans que le Vioxx est dangereux : une étude sur 7000 patients, rendue publique en 2001, montrait que le Vioxx multipliait par 5 le risque d’un accident cérébral ou cardiaque par rapport à un autre anti-inflammatoire (le naproxen). Rien n’a été fait. Non seulement l’Agence du médicament n’a pas suspendu l’AMM, mais elle n’a même pas demandé d’études complémentaires sur ce risque.

C’est seulement au cours d’une nouvelle étude contre placebo, destinée à obtenir des indications complémentaires (prévention des polypes colo-rectaux) que le Vioxx a montré qu’il induisait un accident chez 15 patients sur 1000. Le retrait a été décidé. Comme il y a 2 millions de consommateurs cela fait 30 000 accidents potentiels !

Le principe de précaution n’a donc pas été appliqué. Il faut souligner que les labos veulent de plus en plus accélérer les mises sur le marché pour profiter plus longtemps du monopole que leur donne le brevet. On a donc des médicaments mis sur le marché sans qu’ils soient suffisamment étudiés et connus.

L’autre médicament de la même classe, le Celebrex de Pfizer est-il sans danger ? En fait, on ne sait pas trop puisque la FDA américaine vient de déclarer que les études sur ce médicament ne dépassaient pas 12 mois, alors que le risque apparaît au bout de 18 mois. Rappelons que ce type de médicaments est souvent prescrit dans des pathologies chroniques qui ne disparaissent pas au bout d’un an.

Il apparaîtrait normal que les patients et les familles reçoivent des compensations financières. Il Faut aussi demander que la lumière soit faite sur les retards pris par les autorités de santé et les experts qui n’ont pas joué leur rôle, comme dans l’affaire du sang contaminé. Enfin, Merck devrait rembourser la Sécurité sociale et les mutuelles pour les dépenses injustifiées faites depuis 4 ans, soit environ 300 millions d’euros.

Rappelons que Merck a fait en 2003 un chiffre d’affaires de 2,5 milliards de dollars avec ce seul produit.

Philippe Pignarre
Secrétariat de la commission Santé
Equipe d’animation

Le Vioxx, Retrait Mondial sur Ordonnances

Par Sandrine Cabut et Eric Favereau
Le vendredi 01 octobre 2004

Hier, en milieu de journée, la Food and Drug Administration aux Etats-Unis et l'Agence européenne du médicament à Londres reçoivent simultanément un communiqué du groupe pharmaceutique Merck, leur annonçant le retrait mondial, à effet immédiat, de l'un de ses médicaments vedettes, l'anti-inflammatoire Vioxx, pour cause de risque accru d'accidents cardiaques.

Une décision rarissime touchant une des molécules qui, ces dernières années, avait connu la progression commerciale la plus spectaculaire au monde. Apparu en 1999 aux Etats-Unis, en 2000 en France, le Vioxx (comme le Celebrex, fabriqué par le laboratoire Pfizer) fait partie d'une toute nouvelle classe d'anti-inflammatoires, baptisés coxibs. A leur lancement, ces médicaments ont apparemment tout pour plaire : ils soulagent aussi bien qu'un anti-inflammatoire classique, sans en avoir les inconvénients digestifs (maux d'estomac et autres ulcères).

Une aubaine pour les (très nombreux) patients souffrant d'arthrose ou autres rhumatismes, personnes souvent âgées et consommant moult médicaments. Peut-être est-ce en raison de son trop grand succès et d'une politique commerciale bien agressive ? Le Vioxx défraye rapidement la chronique, s'installant au centre de nombreuses polémiques sur la réalité de son «innovation thérapeutique». Mais rien n'y fait : ce médicament, tel un bulldozer, investit massivement la pharmacopée. En France, avec le Celebrex, il représente plus de 20 % de tous les anti-inflammatoires vendus. En 2003, il a occupé le dixième rang des remboursements de l'assurance maladie : plus de 120 millions d'euros.

«Des retraits, comme celui-ci, c'est exceptionnel», explique-t-on à l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). «On est sidéré et on a du mal à comprendre exactement ce qui s'est passé.» Même stupéfaction au Comité économique du médicament. «C'est une perte très importante pour Merck, et c'est toute la classe des coxibs qui va en prendre un coup», commente Noël Renaudin, son président. Chez Merck-France, on se veut «transparent, «sans la moindre ambiguïté». Et on s'explique ; ces jours-ci, le laboratoire a reçu les derniers résultats d'une étude multicentrique portant sur 2 600 patients, en prévention de la polypose colique (développement de polypes dans l'intestin). Un groupe, prenant du Vioxx, a été comparé avec un groupe recevant un placebo. «A 18 mois, rien, aucune différence dans les effets secondaires. Mais, note le responsable de Merck-France, à 34 mois, nous venons d'apprendre qu'il y a une différence, apparemment significative, sur la survenue d'accidents cardiaques, en l'occurrence des infarctus ou des accidents cérébro-vasculaires. On en compte 45 dans le groupe Vioxx contre 25 dans l'autre groupe.» Presque le double. Selon Merck, la réaction a été immédiate. «Nous avons décidé d'agir ainsi parce que cela sert au mieux nos patients», a ainsi déclaré Raymond Gilmartin, le PDG du groupe pharmaceutique, qui a affirmé qu'il ne démissionnera pas. «Cela a toujours été la position de notre laboratoire, ajoute-t-on chez Merck-France, ne jamais tricher sur nos études de pharmacovigilance.»

De fait, la question du risque cardio-vasculaire autour de ces anti-inflammatoires n'est pas totalement nouvelle. Dès août 2001, le Jama (journal de l'Association médicale américaine) publiait une méta-analyse, qui est une synthèse de toutes les études disponibles, soulevant de sérieux doutes à ce sujet. Dans un essai, où il est comparé à un autre anti-inflammatoire, le naproxene, le Vioxx se montre associé à un risque doublé d'accident cardio-vasculaire grave. Et, toujours selon cet article d'août 2001, les Américains ont déjà sous le coude 200 dossiers de pharmacovigilance impliquant potentiellement le Vioxx ou le Celebrex dans des accidents cardiaques ou vasculaires. En avril 2004, suite à une réévaluation européenne lancée par la France , le rapport bénéfice-risque des coxibs est confirmé. Mais les mises en garde sont renforcées, notamment pour les patients ayant des antécédents de maladies coronariennes. Dans le dernier avis de la commission de la transparence, en mai 2004, il est d'ailleurs précisé : «On peut considérer qu'il y a une tendance à l'accroissement du risque cardio-vasculaire, en particulier du risque d'infarctus du myocarde.» Même constat pour le risque d'accident vasculaire cérébral.

Quid des infortunés patients prenant cette molécule ? Dans un communiqué, l'Afssaps leur recommande de «consulter leur médecin pour modifier leur prise en charge thérapeutique». Sans urgence, toutefois, précise l'agence qui rappelle que ce risque de complication reste faible et n'apparaît qu'à long terme. Tous les lots commercialisés vont néanmoins être retirés, et les essais cliniques interrompus.

Anti-inflammatoires (AINS) du groupe des coxibs : Attention aux risques cardiovasculaires

En pratique, le plus prudent est bien d'en rester aux AINS classiques.

En avril 2004, l'Agence européenne du médicament (EMEA) a considéré que, du point de vue cardiovasculaire, les coxibs « pourraient présenter un léger désavantage de sécurité par rapport aux AINS conventionnels » (1).

La firme Merck Sharp et Dohme-Chibret a annoncé le 30 septembre 2004 le retrait du marché mondial du rofécoxib (Vioxx°), en raison du risque d'infarctus du myocarde et d'accidents vasculaires cérébraux.

Dès 2002, dans l'essai VIGOR les infarctus du myocarde étaient plus fréquents sous rofécoxib (Vioxx°) que sous naproxène (Naproxène° ou autre) ; d'autre part, l'Agence européenne du médicament faisait état d'une incidence d'accidents vasculaires cérébraux plus élevée sous parécoxib (Dynastat°) que sous placebo en période postopératoire en chirurgie cardiaque (2) ; données inquiétantes qui ont aussi été prises en compte par la Food and Drug Administration américaine avant de rejeter la demande d'autorisation de mise sur le marché dans les douleurs aiguës de son métabolite, le valdécoxib (Bextra°), comme l'a révélé en septembre 2004 la revue américaine indépendante Worst Pills Best Pills News (3).

En août 2004, un essai clinique, publié sous le contrôle de la firme Novartis, a montré, chez les patients ne prenant pas d'aspirine à visée antiagrégante plaquettaire, un excès d'infarctus du myocarde sous lumiracoxib (non commercialisé en France) : 0,38 %, versus 0,11 % sous naproxène (4).

En pratique, le plus prudent est bien d'en rester aux AINS classiques.

©La revue Prescrire 1er octobre 2004

Médicaments : ce que les labos ne disent pas - 17 décembre 2004

Le 30 septembre dernier, « l’affaire du Vioxx » ébranle le monde pharmaceutique.

Suspecté d’avoir provoqué la mort de milliers de patients, cet inflammatoire est retiré de la vente le même jour dans tous les pays du monde. Une décision rarissime alors que ce « blockbuster » prescrit à plus de 80 millions de malades, faisait la fortune du laboratoire américain Merck. Que s’est-il passé ? Que savait réellement le laboratoire qui présentait son médicament comme un remède miracle depuis quatre ans ?

Alors que des doutes apparaissent sur le Celebrex, un autre anti-inflammatoire, « l’affaire du Vioxx » lève un voile sur l’une des industries les plus puissantes et les plus secrètes au monde.

Médicaments suspects, méthodes de recherche ou pratiques commerciales opaques: les grands laboratoires brassent des milliards de dollars mais que cachent-ils au grand public? Leur course au profit est-elle toujours sans risque ?

Pour voir ce reportage:
http://info.france2.fr/encadres/7656808-fr.php

Miracle : après Tchernobyl, la France épargnée par le Vioxx!

Le Vioxx, cet anti-inflammatoire prescrit dans l'arthrose aurait fait des dizaines de milliers de victimes aux États-Unis. Et en France ? Selon l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), notre pays aurait été miraculeusement épargné. Un peu comme quand le nuage de Tchernobyl s'est arrêté aux frontières...

Merci Sainte Geneviève !

Quelle est donc cette force divine qui préserve notre beau pays des catastrophes qui ravagent le monde ? Il y a 19 ans, le nuage parti de Tchernobyl, s'était, souvenons-nous-en, miraculeusement arrêté à l'aplomb même des frontières belges, allemandes, suisses et italiennes déversant opportunément ses scories radioactives chez nos voisins avant de poursuivre sa route, rose joufflu et propre comme un poupon sortant du bain, poussé par la brise parfumée du printemps.

Eh bien, mes chers internautes, le miracle s'est reproduit ! La bonne fée qui veille sur la France a remis ça. Cette fois, nous lui devons d'avoir été totalement épargnés par la catastrophe sanitaire du Vioxx. Le Vioxx, ou rofecoxib, c'est ce médicament anti-inflammatoire de l'arthrose et de l'arthrite que le laboratoire Merck a retiré du marché le 30 septembre 2004 pour cause d'infarctus et de morts subites en série. Si l'on en croit les estimations de la Food and Drug Administration, le Vioxx n'a pas fait dans le détail : 88 000 à 139 000 accidents graves rien que pour les États-Unis, comme France-Inter l'a rapporté brièvement le 25 janvier 2005 dans son journal de la mi-journée. Et en France ? Pas plus France-Inter que France 2, qui a consacré une émission au Vioxx... aux États-Unis, ne se pose la question. Car en France, le Vioxx, pourtant prescrit neuf millions de fois, n'a quasiment pas fait de victimes. Merci Sainte Geneviève. Les mêmes conditions de prescription qu'aux États-Unis.

Voilà en substance le message que récite sur toutes les chaînes et dans tous les journaux l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Une belle histoire à la Tchernobyl, un joli conte bien troussé, débité avec une conviction désarmante. Aussi attendrissant que mon plus jeune fils, Louis, quand il s'applique sur un poème de Maurice Carême. Et la presse d'opiner. Pensez, l'Amérique n'a que ce qu'elle mérite : une agence sanitaire, la FDA, financée à 70% par les laboratoires (sous-entendu : au contraire de l'Afssaps), un médicament - le Vioxx - autorisé à des doses et pour des durées de prescription qui n'ont pas court chez nous. Grâce à la clairvoyance de l'Afssaps, le Vioxx est en France un non-événement.

Hélas, tout cela est aussi faux que le sourire peint du clown Auguste. D'abord, précisons que l'essentiel des ressources de l'Afssaps provient, comme pour la FDA, de l'industrie pharmaceutique (eh oui, l'Afssaps est, comme la FDA, financée à près de 70% par les laboratoires !).

Ensuite, la majorité des victimes américaines du Vioxx ont pris le médicament aux doses prescrites en France (12,5 et 25 mg/j). Une analyse parue dans le Lancet sous la plume de Peter Jüni (université de Berne, Suisse) n'a d'ailleurs pas trouvé que les fortes doses (50 mg/j) font plus de dégâts que les doses faibles à modérées. La durée moyenne de prescription ? Tout laisse penser qu'elle était semblable en France et aux États-Unis (3 mois). Comment alors expliquer que les États-Unis recensent des dizaines de milliers de victimes là où l'Afssaps évoque au plus quelques centaines de cas ? Comme le montre l'histoire du Vioxx que je retrace pour l'adaptation française d'un livre à paraître (1), l'Afssaps, avec d'autres agences, a depuis la commercialisation du Vioxx été à la traîne des événements, négligeant les signaux d'alerte qui auraient dû la pousser à intervenir.

Un appel aux victimes du Vioxx

Ce n'est pas sur France-Inter ou sur France 2 que les autorités sanitaires françaises sont accusées de lenteur ou d'incompétence. C'est dans le Lancet, la revue médicale britannique, qui n'est pas forcément lu par vos voisins de palier. Dommage. Car dans le Lancet, Peter Jüni écrit "qu'une augmentation du risque d'infarctus du myocarde était évidente à partir de 2000. À la fin de l'année 2000, cet effet était substantiel, et il était peu probable qu'il fût dû au hasard." Jüni reproche donc aux agences sanitaires de n'avoir pas fait leur travail.

Évidemment, l'agence française cherche à prouver que, contrairement à ce qu'affirment Jüni et d'autres, il était impossible de savoir, avant 2004, que le Vioxx était dangereux. C'est le sens d'une lettre publiée le 1er janvier dans le Lancet par deux experts français "au nom du comité d'AMM (autorisation de mise sur le marché) de l'Afssaps." "Nous nous sentons obligés, écrivent-ils, de répondre à ce qui pourrait être interprété comme une accusation d'incompétence."

L'Afssaps a également tout intérêt à ce que les chiffres officiels des victimes françaises du Vioxx soient les plus bas possibles. Elle évoque donc les données de la pharmacovigilance, en oubliant de préciser que les cas qui lui sont signalés par ce canal ne représentent qu'une fraction du nombre de cas réels.

Il ne faut pas compter sur l'Afssaps, qui n'a rien vu venir de la catastrophe du Vioxx, pour évaluer objectivement le nombre de victimes de ce médicament. Il est déjà anormal que l'organisme qui a autorisé un médicament soit chargé d'en recenser les effets secondaires.

L'Afssaps s'appuie aussi sur les résultats à paraître d'une étude baptisée Cadeus chargée de faire la lumière sur les conditions de prescription des anti-inflammatoires de dernière génération. Ces résultats seraient, selon la rumeur, rassurants. Mais le protocole de l'étude Cadeus souffre de limitations importantes qui ne permettront pas d'évaluer l'ampleur réelle de la catastrophe.

Il n'y a qu'une solution pour savoir ce qui s'est réellement passé en France : que les victimes du Vioxx se fassent connaître. Elles peuvent se signaler conjointement sur ce site : http://www.thierrysouccar.com et auprès de l'Association d'aide aux victimes des accidents des médicaments (AAA-VAM) qui a déjà, selon son président George-Alexandre Imbert enregistré près de 400 cas. (2) Si vous avez pris le Vioxx et connu, même peu de temps après le début du traitement, des problèmes cardiovasculaires ou digestifs, signalez-le. Si un proche est malheureusement décédé d'un arrêt cardiaque alors qu'il prenait ce médicament, faites-le savoir. Il est très important que cet appel soit connu de celles et ceux qui ont pris du Vioxx, pour savoir ce qui s'est passé dans notre pays et qui en sont les responsables.

Je vous tiendrai régulièrement informé(e) de cette nouvelle affaire qui doit nous conduire à exiger une refonte des conditions de fonctionnement des agences sanitaires.

Thierry Souccar, février 2005
(1) Goliszek A, Souccar T : Au nom de la science. Télémaque, Paris, 21 avril 2005.
(2) AAA-VAM,
10 rue de la Paix, 75002 Paris. Tél/fax : 01 41 10 87 00.
Site : www.aaavam.com.
Email : aaavam@wanadoo.fr

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